La modification génétique des embryons pour doper les capacités cognitives fait débat (Journal International de Médecine, Léa Créat)
Paris, le mercredi 23 septembre 2015 – Depuis plusieurs mois, un débat majeur agite la communauté scientifique du monde entier concernant la modification génétique des cellules germinales, voire même des embryons. On le sait plusieurs équipes à travers le monde, notamment aux Etats-Unis, en Chine et en Grande-Bretagne mènent des travaux dans ce sens (une chercheuse britannique a récemment demandé le feu vert des autorités de tutelle pour pouvoir modifier génétiquement des embryons humains à des fins de recherche). Les nouvelles techniques d’édition du génome ou CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Plaindromic Repeats) ont en effet contribué à élargir les perspectives en la matière et permettent d’envisager une « chirurgie » du gène à un stade très précoce pour éviter certaines maladies graves. Cependant, le risque de dérive inquiète plus que jamais et de nombreux scientifiques plaident depuis des mois pour l’instauration si non d’un moratoire, tout au moins d’une réflexion collective… ce qui n’empêche pas les projets de se poursuivre (comme en témoigne le récent exemple britannique).
La neuro amélioration dès le stade embryonnaire : la moitié des jeunes Chinois y sont favorables
C’est notamment la liberté des équipes chinoises qui interpelle. Alors que les premières évocations de tentatives de modifications génétiques de cellules germinales venaient de Chine, des chercheurs de l’Empire du Milieu ont récemment annoncé avoir réussi à augmenter les capacités cognitives de souris en modifiant la séquence de leur ADN. Voilà qui ouvre de nouveaux champs dans le domaine déjà très couru de la « neuro amélioration » et qui suscite de nouvelles interrogations et inquiétudes éthiques. Le spécialiste (entre autres) de ces questions le Dr Laurent Alexandre les évoque dans un article publié dans le Monde en revenant sur les différences observées selon les pays quant à l’appréciation de ces techniques de « neuro amélioration ». Il cite ainsi une enquête à paraître de l’agence de communication BETC qui met en évidence que si 13 % des Français considèrent de manière favorable la possibilité d’augmenter le quotient intellectuel futur d’un enfant en agissant dès la phase embryonnaire, 39 % des Indiens et des Chinois se montrent séduits (et jusqu’à 50 % des jeunes Chinois).
Faut-il y croire ? Ces résultats montrent non seulement la diversité des opinions, mais suggèrent également une grande confiance dans ces technologies. La science pourrait-elle réellement améliorer le QI des enfants à naître, QI dont beaucoup considèrent pourtant qu’il est le résultat d’une conjonction de facteurs multiples, pas uniquement génétiques ? Pour le philosophe Nick Bostrom de l’université d’Oxford, cité par Laurent Alexandre, cela ne fait aucun doute : il prophétise qu’en agissant sur les gènes des embryons, soixante points de QI pourraient être gagnés au sein de la population d’un pays. Et Laurent Alexandre de conclure en citant ceux qui jugent que face à l’émergence de l’intelligence artificielle, l’homme n’aura d’autre choix que de recourir à ces techniques pour faire face aux machines !
Science ou fiction, ça reste à voir.
Léa Créat