Autisme : la Cour des comptes déplore des progrès insuffisants, surtout chez les adultes (Coline Carré, Le Quotidien du Médecin)
Alors que le gouvernement doit dévoiler prochainement le 4e plan autisme, après six mois de travaux, la Cour des comptes publie son rapport sur l’évaluation de la politique en direction des personnes présentant des troubles du spectre de l’autisme (TSA), réalisé à la demande de l’Assemblée nationale. Un travail qui dénonce l’accueil réservé aux adultes et l’insuffisance des progrès en direction des enfants, et rejoint ainsi les conclusions de l’inspection générale des affaires sociales, de mai dernier.
La Cour des comptes déplore l’insuffisance des données concernant les adultes. Le contenu des interventions qui leur sont destinées va faire l’objet « prochainement » de recommandations de bonne pratique de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l’Agence nationale d’évaluation et de la qualité des établissements sociaux et médico-sociaux (ANESM) (celles sur l’enfant sont sorties en 2012).
Mais d’ores et déjà, apparaît la faiblesse de l’accès au diagnostic des TSA, des pathologies psychiatriques qui peuvent y être associées (dépression), et des comorbités somatiques. La Cour des comptes dénonce l’insuffisance des actions d’insertion sociale, d’insertion professionnelle, et des actions sur l’environnement (manque de structures temporaires ou de répit) ainsi que l’absence de structuration des parcours, responsable des ruptures entre adolescence et âge adulte.
Soins et repérage hétérogènes pour les enfants
Les Sages posent un regard à peine moins sévère sur la prise en charge des enfants. Ils notent des résultats positifs dans la création des places d’hébergement dans les établissements et services médico-sociaux (qui s’élèvent à plus de 3 000 fin 2016), mais les tensions sur l’offre persistent, comme le montre le nombre d’enfants accueillis en Belgique, les listes d’attente en France, et les plaintes des parents.
« Les progrès sont également notables au plan qualitatif », juge la Cour, mais les résultats restent très hétérogènes, notamment en ce qui concerne les soins et l’accompagnement dispensés dans les hôpitaux de jour et les centres médico-psychologiques, ainsi que par les professionnels libéraux : « Ces soins sont moins renseignés et hétérogènes d’après les éléments disponibles », lit-on.
C’est aussi l’hétérogénéité qui domine dans les progrès réalisés autour du repérage, du diagnostic, et des interventions précoces, un triptyque au cœur du 3e plan autisme (2013-2017), et déjà prioritaire lors du 2e plan. Comme l’IGAS, la Cour constate que les centres ressource autisme, dédiés en théorie aux cas complexes, « sont encombrés par des demandes de diagnostic qui dégradent leurs délais de réponse ».
Concernant les interventions, les sages saluent le progrès que représentent le développement des unités d’enseignement maternelles autisme et les services d’éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD), mais rappellent que ces structures ne répondent qu’à 15 % des besoins. « Les autres formes d’intervention, encore insuffisamment recensées, seraient souvent éloignées en intensité et en contenu des recommandations de bonne pratique de la HAS et de l’ANESM selon les informations communiquées à la Cour », lit-on.
Quant à la scolarisation, le bilan reste mitigé en dépit des efforts vers plus d’inclusion.
Nouvelle impulsion
En conclusion, la Cour appelle à une nouvelle impulsion pour le 4e plan autisme. Concrètement, cela doit se traduire par l’approfondissement des connaissances, sur les coûts des prises en charge (estimé à 4 milliards d’euros par an), la prévalence des TSA chez les adultes et leur prise en charge, l’offre en psychiatrie, et l’utilisation plus homogène des échelles de mesure de la sévérité des troubles.
La rue Cambon demande un soutien plus affirmé à la recherche publique sur les TSA avec la création d’un institut du neuro-développement adossé à un établissement scientifique comme l’INSERM, chargé de coordonner les projets.
Elle invite par ailleurs les ARS à trouver un second souffle pour remplir leurs missions : déployer le triptyque précoce, identifier les structures de proximité, structurer les réseaux, développer des partenariats avec l’Education nationale, et construire des parcours plus inclusifs.
Enfin, la Cour des comptes préconise de renforcer le suivi des actions.
« Au stade actuel, on ne guérit pas l’autisme, mais on peut notablement améliorer la trajectoire développementale (…), réduire les manifestations des troubles et rendre possible une inclusion durable dans la vie sociale et professionnelle », rappelle la Cour en introduction.