Autisme : lancement à l’Elysée d’une concertation de 6 mois pour « co-construire » le 4e plan (Coline Garré, Le Quotidien du Médecin)
C’est en grande pompe sous les ors de la République et en présence de 4 ministres, la secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées Sophie Cluzel, la ministre de la Santé Agnès Buzyn, ses homologues à la Recherche Frédérique Vidal et à l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer, qu’a été lancée, ce 6 juillet, la concertation préalable au 4e plan autisme.
Cette concertation doit donner naissance dans 6 mois au 4e plan autisme. Entre juillet et décembre 2017, des réunions se tiendront dans toute la France, par souci d’être au plus près des territoires, autour de quatre objectifs : co-construction avec les associations d’usagers et leurs familles, mobilisation des territoires, prise en compte des parcours et accentuation de l’inclusion des personnes, et identification de leviers d’action priorisés et concrets.
Parallèlement, au niveau national, cinq groupes de travail se pencheront sur la scolarisation, la formation professionnelle, et l’enseignement supérieur, l’insertion sociale et professionnelle, la recherche et l’innovation, les familles et parcours, et enfin, la qualité des interventions et l’accompagnement au changement.
Transversal et territorial
Le comité de pilotage présidé par Claire Compagnon (auteure en tant qu’inspectrice générale des affaires sociales de l’évaluation du 3e plan autisme) sera garant de la méthode et du calendrier. « Il doit accueillir encore plus que celui du 3e plan l’interministérialité et la faire vivre, ainsi que les professionnels de santé et les collectivités territoriales », a indiqué sa consœur Delphine Corlay. Celle-ci prendra la tête du secrétariat général du comité interministériel du handicap (SG-CIH), chargé de la rédaction avec quelques figures imposées : mesures limitées et priorisées ; articulées avec l’ensemble de la politique générale du handicap ; et permettant éventuellement une généralisation à l’ensemble des handicaps, ou au moins, les troubles neurodéveloppementaux.
La ministre de la Santé Agnès Buzyn qui a fait du dialogue et de la co-construction son « discours de la méthode », a exhorté tous les professionnels de santé à s’engager dans ce « travail collectif : Que vous exerciez en libéral, en établissement de santé, dans une structure sociale ou médico-sociale, vous contribuez à améliorer la vie des personnes », a-t-elle exhorté. Parmi les priorités qu’elle a fixées : « Le renforcement de la qualité des interventions au sein des établissements et des hôpitaux de jour, et la formation des professionnels. »
Conseils départementaux, agences régionales de santé (ARS), services de l’État, sans oublier les associations, seront aussi fortement mobilisés. « Les politiques sanitaires, sociales et médico-sociales doivent être adaptées à la réalité des territoires », a insisté le Pr Buzyn. La ministre a précisé que ces travaux s’articuleront avec ceux du comité de pilotage de la psychiatrie et du conseil national de la santé mentale.
Emmanuel Macron, qui a clos la cérémonie, a salué l’approche tranversale et pragmatique, qui laisse voix à la multiplicité des acteurs. « La plus-value du 4e plan, sera l’articulation du médico-social et du non-médicosocial, et un meilleur accompagnement des adultes », a-t-il déclaré.
Tirer les leçons des précédents plans
Ce 4e plan ne part pas de rien. « Il y a eu des avancées en 3 plans : l’autisme est devenu un enjeu de santé publique », a souligné Sophie Cluzel, citant aussi la création de centres ressources autisme (CRA) et l’élaboration des recommandations de bonnes pratiques. « Mais trop de personnes ne sont pas diagnostiquées, sans solution d’accompagnement, isolées dans leur fragilité », a-t-elle regretté.
Les failles du 3e plan autisme sont résumées dans le rapport IGAS/IGEN : une gouvernance et un suivi défaillants, faute d’indicateurs ; une mauvaise conception pour la prise en charge des adultes ; quant aux enfants, les parcours restent trop chaotiques. Sans oublier la difficulté persistante de l’accès aux soins pour ces personnes qui présentent souvent des comorbidités.
Une commission scientifique internationale a aussi fait le point sur les consensus actuels et surtout les zones d’ombre : une prévalence de 1 % qui augmente dans les pays industrialisés, sans qu’on puisse avancer avec certitude des explications, a rappelé le Pr Amaria Baghdadli (INSERM), l’importance du diagnostic précoce, mais des outils pas « entièrement fiables » (Pr Bernadette Roge, Toulouse), le rôle crucial de l’expertise familiale, l’ampleur des comorbidités. Quant au débat autour de l’approche psychanalytique pour de jeunes enfants, « il faut rappeler que c’est sur le comportemental et le développemental qu’on a les données les plus solides », a indiqué Claire Compagnon.
Le Pr Thomas Bourgeron (Institut Pasteur) a insisté sur le manque de financement de la recherche : « zéro euro dans les deux premiers plans, 500 000 euros sur trois ans, dans le 3e. J’espère qu’il va y avoir une bonne nouvelle dans le 4e ! ». Réponse dans 6 mois.
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