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La recherche sur les maladies psychiatriques à l’honneur. Quatre millions pour mieux comprendre la physiopathologie (Coline Garré, Le Quotidien du Médecin)

Seize projets de recherche en psychiatrie se partagent une enveloppe de 4 millions d’euros attribuée par la Fondation pour la recherche médicale (FRM). Leur atout : approfondir la connaissance de la physiopathologie des maladies psychiatriques et développer une approche translationnelle.

« 4 millions d’euros, c’est près d’1/5e du budget recherche en psychiatrie », souligne le Pr Pierre Thomas, président de comité scientifique de la FRM, et chef du pôle psychiatrie, médecine légale, médecine en milieu pénitentiaire, au CHRU de Lille.

Autant dire que l’enveloppe de la FRM, à la clef d’un appel à projet thématique lancé en 2014, est significative pour une discipline qui reste le « parent pauvre de la recherche », notamment biomédicale, en ne représentant que 2 % de ses investissements globaux (soit 24,8 millions d’euros, selon les chiffres publiés par Karine Chevreul et col. en 2012, dans « The Journal of Clinical Psychiatry »).

Pourtant, les maladies psychiatriques touchent 12 millions de personnes en France. Sans compter que « pour une personne atteinte, on considère que 7 proches sont concernés », rappelle le Pr Thomas. La dépression toucherait entre 4 et 5 millions de Français, les troubles bipolaires, 1 à 2,5 % de la population, la schizophrénie, 1 % et les troubles du spectre autisme, 1 enfant sur 160. En 2011, l’observatoire national du suicide a recensé 11 400 décès volontaires en France. Quant au coût pour la société, la facture des maladies psychiatries se chiffrerait entre 107 et 109 milliards d’euros par an.

Microbiote, stimulation cérébrale, phénomènes inflammatoires

Malgré les progrès en génétique et en imagerie cérébrale (notamment fonctionnelle), les causes des maladies psychiatriques, multiples, restent méconnues, la pose d’un diagnostic se révèle souvent tardive (2 ans en moyenne pour la schizophrénie, 10 ans pour les troubles bipolaires), et les traitements pharmacologiques découverts dans les années 1950 n’ont pas fait l’objet d’innovation majeure, malgré des améliorations en matière de tolérance et de sécurité. En outre, l’accès aux soins spécialisés se révèle parfois délicat car pétri de préjugés. « Certes les CMP sont gratuits, mais d’aucuns ont des réticences; protestent « je ne suis pas fou ». On parle « d’aller voir quelqu’un ». Certains lieux sont très connotés comme les anciens asiles », explique le Pr Thomas.

Le comité scientifique de la FRM s’est donc attaché à financer (grâce à l’argent des donateurs et de mécènes, indépendants des laboratoires pharmaceutiques) des projets permettant de mieux cerner les mécanismes physiopathologiques de maladies psychiatriques. « On a souhaité comprendre les causes de la maladie, en accordant un bonus aux projets translationnels, qui font le lien entre la recherche fondamentale et la clinique, pour que les patients puissent en bénéficier rapidement », justifie Valérie Lemarchandel, directrice des affaires scientifiques à la FRM.

Parmi les 16 équipes qui ont reçu entre 150 000 et 300 000 euros, pour 2 ou 3 ans de recherche, 6 travaillent sur la schizophrénie, les autres se concentrent sur la dépression, l’anxiété, l’autisme, et les thérapies innovantes. Ont été ainsi retenus le projet du Pr Luc Mallet (Institut de recherche sur le cerveau et la moelle épinière, La Pitié-Salpêtrière), qui entend développer des biomarqueurs prédictifs de la sensibilité au traitement des troubles obsessionnels compulsifs par stimulation cérébrale profonde, ou, sur le versant non invasif, celui du Pr Caroline Dubertret (Centre de psychiatrie et neurosciences de Paris), qui prévoit d’étudier l’activité cérébrale de schizophrènes à l’aide de la stimulation magnétique transcrânienne.

Microbiote et autisme

Également soutenu par la FRM, le directeur de l’unité « neuropathies du système nerveux entérique et pathologies digestives » du CHU de Nantes, Michel Neunlist, doit approfondir le rôle du microbiote dans l’autisme. « En prélevant du microbiote d’une souris présentant des traits proches de l’autisme et en le greffant à une souris x, on a vu chez cette dernière se développer des comportements apparentés à l’autisme. Le pari est qu’une greffe de microbiote pourrait avoir des perspectives thérapeutiques », résume le Pr Thomas. Autres pistes novatrices, l’équipe de Lucile Capuron, (Université de Bordeaux) devrait explorer le rôle des processus inflammatoires dans la dépression, tandis que celle de Laurent Groc (Institut interdisciplinaire de neurosciences de Bordeaux) se penchera sur l’implication du système immunitaire dans la schizophrénie. Enfin, à Montpellier, le Dr Émilie Olié évaluera l’impact des thérapies ciblées sur la motivation chez les patients suicidaires

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