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Des psychiatres et des psychologues dénoncent « l’interdiction » du packing (Aurélie Laroche, Journal International de Médecine)

Paris, le mardi 31 mai 2016 – Nous avons évoqué récemment comment la prise en charge de l’autisme continue d’être l’objet de débats véhéments entre certaines associations de patients et une grande partie des psychiatres, qui aujourd’hui se sentent injustement écartés de soins qu’ils ont assurés pendant des années. Les controverses autour de la technique du packing illustrent la complexité de ces polémiques.

Dénonciation aveugle

Utilisée dans les années 70 aux Etats-Unis pour répondre aux crises violentes d’automutilation de patients schizophrènes, la technique du packing consiste à empaqueter le patient dans des linges mouillés et froids, afin que le malade puisse reprendre conscience de son corps. Elle a été appliquée en France à certains enfants psychotiques ou autistes au début des années 80, notamment par le professeur Pierre Delion (CHU de Lille). Le praticien avait obtenu des résultats très encourageants : les crises d’automutilation diminuaient, voire disparaissaient chez un grand nombre de ses malades. Les résultats ont incité d’autres services à utiliser cette technique. Cette dernière est sous-tendue par plusieurs thèses psychanalytiques et est par ailleurs utilisée sans réelle codification, entraînant un risque de situations  abusives. Quand les associations de parents d’autistes ont commencé au début des années 2000 à dénoncer les « méfaits » de la psychanalyse sur la prise en charge de leurs enfants, le packing a été une des premières méthodes pointées du doigt, le plus souvent par des familles n’ayant jamais assisté à la mise en œuvre de cette méthode. Bientôt, le packing a été considéré comme un acte de « maltraitance », jusque dans les arcanes du Comité des droits de l’enfant de l’ONU qui dans une décision publiée en février 2016 plaida pour l’interdiction de cette pratique.

Abus de pouvoir

Le point ultime de cette condamnation a été la publication au début du mois de mai d’une circulaire signée de Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat aux personnes handicapées et de Marisol Touraine, ministre de la Santé. Ce texte conditionne « La signature des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) avec des gestionnaires d’établissements et services accueillant les personnes avec des troubles du spectre de l’autisme (…) à l’absence totale de pratique du packing ».

Cette décision suscite aujourd’hui l’ire de plusieurs psychiatres, psychologues et infirmiers, membres du collectif 39 contre la nuit sécuritaire, regroupement de spécialistes de la santé mentale qui milite depuis plusieurs années entre autres contre l’augmentation du recours à la contention ou à l’isolement. Pour ces praticiens très soucieux du respect de la dignité des patients, le packing n’est nullement une méthode à considérer comme maltraitante. Ils viennent de publier dans le Huffington Post une tribune qui s’indigne de la décision du gouvernement. 

D’abord, ces praticiens considèrent que « prescrire comment soigner ou traiter telle ou telle pathologie dépasse outrageusement le cadre de ce qui peut entrer dans un texte de financement ». Ils regrettent par ailleurs que seuls les opposants au packing aient été écoutés et signalent que certaines familles touchées par l’autisme, réunies au sein du Rassemblement pour une approche des autismes humaniste et plurielle (RAAHP) ne partage pas la condamnation absolue contre le packing nourrie par exemple par Vaincre l’autisme. Ils dénoncent enfin le fait que cette interdiction jette un entier discrédit sur « l’orientation thérapeutique des équipes soignantes engagées depuis des années auprès d’enfants et d’adultes en grand désarroi et en grande souffrance psychique ».

Une défense trop timide

Il est peu probable que cet appel soit entendu tant le poids des opposants au packing est fort et tant l’assimilation à un acte de « maltraitance » apparaît désormais ancrée dans les esprits. La probable méconnaissance de la technique par les représentants des pouvoirs publics ne devrait pas constituer un argument suffisant pour opérer un retour en arrière. Il faut dire que les défenseurs du packing ne peuvent s’appuyer sur un soutien aussi marqué que leurs opposants. Les familles qui ont pu bénéficier de la technique et qui y sont favorables sont peu nombreuses à s’exprimer pour différentes raisons. Beaucoup notamment, si elles ne partagent pas la condamnation portée contre le paking, se montrent sensibles à d’autres revendications défendues par les associations qui militent pour son interdiction et se refusent à envoyer un message éventuellement source de confusion. Les praticiens qui mettent en œuvre le packing se refusent également bien souvent à entrer directement en conflit avec leurs autorités de tutelle et plus encore avec les familles. Enfin, les études scientifiques manquent, bien que les rares données publiées se montrent effectivement favorables à l’utilisation du packing face aux crises d’automutilation. D’importants travaux ont été conduits notamment sous la houlette du professeur Delion à Lille, mais les résultats définitifs tardent à être publiés. Menées par un des plus fervents défenseurs du packing, ces recherches ne devraient pas en tout état de cause, quels que soient leurs résultats, avoir une influence sur la ligne adoptée aujourd’hui par le gouvernement.

A tort ou à raison.

Aurélie Haroche 

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