Une conférence du handicap… sans les associations (Grégoire Griffard, Journal International de Médecine)
Paris, le mercredi 26 avril 2023 – Le Collectif Handicaps, qui regroupe 52 associations, a décidé de boycotter la conférence nationale du handicap (CNH).
Il y aura du beau monde ce mercredi à l’Elysée à l’occasion de la 6ème conférence nationale du handicap (CNH), qui réunit tous les trois ans les « acteurs » du secteur pour faire un point sur les politiques d’inclusion des personnes handicapées ou plus consensuellement en situation de handicap. Le Président de la République sera bien sur présent, ainsi que la Première Ministre, d’autres membres du gouvernement, des représentants des collectivités territoriales, des entreprises…mais peu ou pas d’associations. Le Collectif Handicaps, qui regroupe 52 des plus importantes associations d’aides aux personnes handicapées, a en effet décidé de boycotter l’évènement.
Il y a une semaine, dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron, le collectif avait déjà demandé le report de la conférence, estimant que ses travaux préparatoires avaient été « marqués par un manque apparent d’ambition ». « Après des centaines d’heures de réunions et autant de recommandations formulées, nos associations n’ont, une semaine avant la tenue de cette conférence, toujours pas la moindre information sur les annonces qui seront faites ce jour-là » peut-on lire dans la lettre.
Les associations ne veulent pas être instrumentalisées
En clair, les associations se refusent d’être instrumentalisés dans une sorte d’exercice d’autocongratulation de l’exécutif et souhaitent pouvoir échanger avec le chef de l’Etat sur la politique du handicap. « La CNH ne peut se limiter à une succession de tables rondes conclues par votre intervention et à la publication d’un dossier de presse. Il n’est pas acceptable que les associations découvrent au dernier moment les annonces, sans droits de réponse, d’expertise, de contre-propositions » écrit le collectif, s’adressant directement au chef de l’Etat. Arnaud de Broca, président du Collectif Handicaps, souhaite notamment que la CNH soit l’occasion de discuter de la décision du Comité européen des droits sociaux (CEDS), un organe rattaché au Conseil de l’Europe, qui a jugé le 17 avril dernier que la France avait failli à ses engagements sur la garantie des droits fondamentaux des personnes handicapées.
Le Collectif Handicaps terminait sa lettre du 19 avril par une menace de boycott de la conférence. Il conditionnait sa présence à la possibilité d’une « prise de parole politique devant le Président de la République ». Cette demande n’ayant pas été satisfaite, le collectif a donc mis sa menace à exécution, même si les associations membres du collectif restent libre de participer à la CNH individuellement. « On nous a proposé plusieurs formats d’intervention, mais aucun ne convient, nous n’irons donc pas » se justifie Arnaud de Broca.
L’Elysée promet des « annonces fortes »
Depuis l’annonce définitive de ce boycott ce lundi, du côté du gouvernement, on essaye tout à la fois de répondre aux arguments du collectif et de minimiser l’importance de cette absence. S’agissant de l’insuffisance des travaux préparatoires, l’Elysée explique notamment que « quarante réunions sur huit groupes de travail » ont été organisées en amont de la CNH. « Ce n’est pas parce qu’on réunit les gens dans une salle qu’il y a de vrais échanges et un débat » répond Arnaud de Broca. Concernant la récente condamnation de la France par le Conseil de l’Europe, l’exécutif répond que cette décision « se base sur des réclamations portées en 2018 et que depuis, de nouveaux droits ont été ouverts ».
Pour le reste, le gouvernement met en avant son bilan des six dernières années sur la question du handicap, notamment sur l’éducation : 430 000 enfants handicapés sont scolarisés dans des établissements ordinaires en 2023, contre seulement 320 000 en 2017. L’Elysée promet « des annonces fortes » à l’occasion de la CNH et « des implications immédiates sur les trois années à venir ». « Le CNH apportera des réponses concrètes pour améliorer la vie des personnes en situation de handicap, leurs familles et leurs aidants, tous les sujets de la vie quotidienne seront abordés, il y aura un avant et un après CNH dans notre société » promet Geneviève Darrieussecq, ministre délégué aux Personnes handicapés. Mais pour le moment, cette 6ème CNH aura surtout été une nouvelle preuve de la difficulté grandissante du gouvernement de dialoguer avec les partenaires sociaux.