Le handicap, grand oublié du débat présidentiel (Aurélie Haroche, Journal International de Médecine)
Paris, le mercredi 15 mars 2017 – Le bilan tiré par la plupart des associations de défense des personnes handicapées de l’action menée au cours des cinq dernières années concernant l’intégration des handicapés dans notre société est décevant. Concernant notamment l’accès à l’emploi, elles se désolent de l’explosion du chômage. Celui-ci a en effet progressé de 46 % depuis 2012, soit un accroissement deux fois plus rapide que pour l’ensemble de la population. L’absence de réforme du financement des Fonds pour l’insertion des personnes handicapées aura notamment empêché un nouvel élan. Les organisations se montrent également déçues des mesures adoptées qui ont contribué à repousser les objectifs fixés par la loi de 2002 en matière d’accessibilité des lieux publics. Sur d’autres dossiers, les avancées ont été trop timides, telle l’augmentation du nombre de places d’accueil, la limitation de « l’exil » de certains enfants handicapés en Belgique, ou encore l’amélioration de la prise en charge des patients autistes. Néanmoins, des coups de pouce significatifs ont été donnés économiquement, avec le cumul de la prime d’activité et de l’allocation adulte handicapé, qui a offert une hausse du pouvoir d’achat à un grand nombre de sujets concernés.
12 millions d’électeurs ignorés
Le rendez-vous avec le monde du handicap a donc été globalement manqué au cours des cinq dernières années et l’engagement des candidats à la présidentielle ne laisse guère augurer de profond changement. Ceux qui se destinent à la fonction suprême se contentent en effet d’un service minimum, glissant sur le sujet en quelques secondes à l’occasion de leurs interventions. Ainsi, la question n’a quasiment pas été abordée lors des primaires de la droite, puis lors de celles de la « Belle Alliance ».
Pourtant, les enjeux sont nombreux et bien identifiés. Ils sont rappelés dans une lettre ouverte adressée par seize personnalités touchées directement ou indirectement par le handicap. C’est Philippe Croizon, amputé des quatre membres, après avoir été la victime d’un arc électrique, qui s’est lancé ce nouveau défi. Il n’ignore pas que ce challenge est probablement plus ardu encore que la traversée de la manche qu’il a accomplie il y a quelques années. Mais l’urgence nécessitait cette nouvelle prise de risque. « Comment peut-on à ce point ignorer 12 millions d’électeurs ? », s’interroge en effet celui qui depuis des années veut offrir une autre image du handicap, en démontrant la possibilité de se surpasser.
De Dominique Farrugia à Grand Corps Malade
Pour que tous ceux qui sont touchés par le handicap ne soient plus laissés pour compte, Philippe Croizon a réuni autour de lui des personnalités marquantes, Dominique Farrugia, qui souffre de sclérose en plaques, Grand Corps Malade, qui a évoqué dans de nombreuses chansons et récemment dans un film son parcours de patient, la journaliste Eglantine Eméyé mère d’un petit garçon autiste ou encore plusieurs athlètes ayant concouru lors des jeux paralympiques. Tous partagent le même constat de l’invisibilité scandaleuse du handicap dans les discours des politiques. Ils invitent aujourd’hui ces derniers à se prononcer sur cinq sujets : les ressources, l' »exil » des personnes handicapées en Belgique faute de structures adaptées en France, l’accessibilité des lieux et transports publics, la scolarité et l’emploi.
Aurélie Haroche