Autisme : la proposition de résolution de Fasquelle quasi unanimement rejetée à l’Assemblée (Coline Garré, Le Quotidien du Médecin)
L’Assemblée nationale a rejeté ce 8 décembre la proposition de résolution de Daniel Fasquelle, signée par près d’une centaine de députés LR (dont Laurent Wauquiez, Bernard Debré ou Nathalie Kosciusko-Morizet) mais contestée par de nombreux psychiatres, qui invitaient à « promouvoir une prise en charge de l’autisme basée sur les recommandations de la Haute Autorité de santé », afin que la France « renonce officiellement au packing, à la psychanalyse, et à toutes les approches maltraitantes ».
« Sortons du Moyen-Âge dans le traitement de l’autisme et redonnons espoir aux familles », a lancé depuis la tribune Daniel Fasquelle, vantant les méthodes éducatives et comportementales, érigeant en modèles le Canada et la Belgique, allant jusqu’à établir un parallèle avec l’affaire du Mediator et le scandale du sang contaminé.
Mais le député n’a guère trouvé d’appui, en dehors de Gilles Lurton (LR), le non-inscrit Jacques Bompard ou, in extremis, Meyer Habib de l’UDI, qui ont justifié leur décision par le souci de donner toute sa place à la famille.
Le député LR Nicolas Dhuicq, lui-même psychiatre, a dénoncé en tant que médecin un « texte dépassé » qui méconnaît la pluralité des troubles (et donc des approches thérapeutiques) et ouvre vers des dérives dangereuses.
Spectre d’une science officielle, détournement des recos HAS
Nombreux sont les députés de tous bords qui ont mis en garde contre les dangers d’une science officielle, et contre l’intrusion ou l’ingérence du politique dans le médical. « Les professionnels de santé n’ont pas à se plier au législateur, mais à leur code de déontologie », a déclaré Gérard Sebaoun. « Vous revenez sur les piliers de notre législation sanitaire », le libre choix du médecin par le patient, et la liberté de prescription, a enchéri la socialiste Chantal Guittet. Et de dénoncer un glissement vers des « thérapeutiques d’État », qui rappellent la « biologie de Lyssenko ». « Du Lyssenko au petit pied », a également accusé le député Denys Robiliard (spécialiste des questions de psychiatrie), tout en dénonçant un détournement du rôle de la Haute Autorité de santé (HAS). « Ses recommandations sont là pour aider le praticien, mais elles ne sauraient dispenser le professionnel de santé de faire preuve de discernement dans sa prise en charge du patient. Vous voulez les rendre obligatoires, c’est aux antipodes de ce que veut la HAS », a-t-il expliqué.
Et de souligner en outre les inexactitudes de l’exposé des motifs de la résolution, que ce soit sur les chiffres des personnes concernées par le spectre des troubles autistiques, l’efficacité des méthodes comportementales, ou encore la référence aux textes de loi.
Défense de la libre prescription
C’est une « attaque sans précédent contre l’ensemble des professionnels de santé », a enfin dénoncé la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, Ségolène Neuville. « Il n’est pas souhaitable qu’un gouvernement fasse de la médecine à la place des médecins (…) Seule la science doit guider les décisions médicales », a-t-elle poursuivi, appelant au respect du code de santé publique, du code de déontologie des médecins, et du serment d’Hippocrate. Elle a rappelé qu’un médecin ne relève pas de la justice pénale, mais avant tout de la justice disciplinaire de son Ordre. « Sinon, c’est en faire un criminel en sursis », s’est-elle étouffée.
Ségolène Neuville a enfin regretté que cette proposition de résolution ait « pour effet de raviver des tensions qui n’ont plus lieu d’être ». « Votre résolution nous divise plutôt qu’elle nous unit », a conclu Philippe Cordery.