Hypersensibilité au gluten Une entité à mieux définir (Dr Sophie Parienté, Le Quotidien de Médecin)
Rappelons que le blé contient 70 % d’amidon (des sucres non allergisants), de l’eau et 15 % de protéines (à 80 % du gluten, constitué pour moitié de gliadines potentiellement allergisantes).
La maladie cœliaque (MC)
La maladie cœliaque ou intolérance au gluten est une entéropathie inflammatoire chronique auto-immune réactionnelle à un antigène alimentaire, la gliadine. « Depuis 2012, le diagnostic de MC chez l’enfant est modifié », rappelle le Dr Bellaïche. En cas de suspicion clinique, il convient de doser les IgA totales et les IgA anti-transglutaminases (anti-TG2). Un dosage négatif élimine la MC (IgA totales : normal ; IgA anti-TG2 : négatif) ; Un dosage positif fait référer au gastropédiatre.
Le diagnostic repose sur l’association : clinique évocatrice, anti-TG2 > 10 fois la normale, présence d’AC anti-endomysium et haplotype HLA DQ2/DQ8 (autorisation parentale requise). « Contrairement à l’adulte, la biopsie n’est pas toujours nécessaire au diagnostic chez l’enfant, explique le Dr Bellaïche. Les formes très typiques sont rares avant 2 ans, 63 % des cas nécessitent une biopsie ». Les MC infra-cliniques existent, mais les recommandations actuelles sont de ne dépister l’enfant asymptomatique à risque que si la famille le demande. Préférer au dosage anti-TG2, le typage HLA : tout risque de MC est écarté s’il est négatif.
La MC impose un régime sans gluten à vie, d’où un diagnostic avalisé à l’hôpital. Les farines contenant du gluten sont interdites (blé, froment, épeautre, kamut, seigle, orge, triticale) ; celles sans gluten autorisées (riz, mais, canne à sucre, avoine, millet, larme-de-Job, ragi, quinoa, sarrasin) ainsi que la poudre d’amande. « L’avoine peut être consommée si elle est pure », note le Dr Bellaïche.
L’allergie au blé
L’allergie aux α/β/γ gliadines du blé est rare mais existe. Chez le nourrisson diversifié, le diagnostic est évoqué quand l’éviction du lait de vache est inefficace devant un tableau de diarrhée, eczéma, cassure de la courbe de poids. Le test de provocation orale confirme le diagnostic. Chez l’adolescent, y penser devant un asthme à l’effort après un sandwich.
Hypersensibilité au gluten
L’hypersensibilité au gluten (ni auto-immune, ni allergique) chez l’adulte, décrite en 2012, a été très médiatisée. Chacun s’est demandé si un régime sans gluten lui ferait du bien. Les symptômes (asthénie, douleurs abdominales) induits par l’ingestion de blé ne relèvent ni de maladie cœliaque, ni d’allergie au blé (biologie et tests, négatifs).
Les premières publications, pédiatriques d’une hypersensibilité au gluten non cœliaque (SGNC) datent de 2014 : l’asthénie et la diarrhée s’améliorent sans gluten, les IgG anti-gliadines sont positifs (ils ont mangé du blé), le typage HLA DQ2/DQ8 positif à 46 % (vs 40 % dans la population générale) et l’épreuve d’exclusion-réintroduction positive. « Dans le syndrome de l’intestin irritable (SII), le régime sans gluten améliore 30 % des patients… l’idée a émergé qu’une partie non allergisante du blé (les FODMAPS, ou sucres fermentescibles non absorbés) pourrait être mal supportée », explique le Dr Bellaïche. Les publications se multiplient, depuis 3 ans sur l’intérêt d’un régime sans FODMAPS dans le SII (régime « chasseur-cueilleur » PALEO principalement sans blé, ni millet, larme-de-job, ragi). SII, SGNC et intolérance aux FODMAPS sont-elles des entités distinctes ? L’hypersensibilité au gluten est-elle une réaction adverse à une consommation excessive de FODMAPS ou à une consommation de gluten ? La question est ouverte. Retenons avec le Dr Bellaïche que : « Chez l’enfant, le risque majeur des régimes sans gluten et sans FODMAPS est la dénutrition ! Y réfléchir avant de prescrire et adresser à une diététicienne ! Les aliments sans gluten ne sont pas forcément plus sains (moins de protéines, plus d’additifs). Enfin, la littérature a prouvé l’absence d’effet sur l’autisme des régimes sans FODMAPS et sans gluten ».